Pour un trickster, pas d’arrêt sur image
Une clé du fonctionnement intellectuel de Jung peut se lire dans son attitude vis-à-vis des commencements : d’abord dans le démarrage de l’écriture des Cahiers Noirs, puis dans celui de son grand projet, Le Livre Rouge. Jung commence, puis recommence : sa méthode est placée sous le signe du processus, du devenir, du travail sans cesse repris et reformulé. Si l’on observe sa démarche créative en la soumettant à un travail d’amplification, on voit qu’il ne bâtit pas des concepts rigides, que sa pensée laisse toujours « du jeu », qu’il refuse les systèmes et préfère les dynamiques. Aimant laisser ouverts les possibles, Jung est un esprit mercuriel, un vif-argent intellectuel. On peut repérer les outils dont il se sert : la pensée circulaire (circumambulation), l’acceptation délibérée d’une certaine dose d’ambigüité, la mise en équilibre des opposés (ou leur retournement par énantiodromie), sa préférence pour la sinuosité contre les lignes trop droites. Enfin, une certaine impossibilité à clore par un « point final » et un goût de l’inachevé, gardé ouvert parce que laissé en suspens, correspondent certes à la nature de son objet d’étude – l’inconscient – mais, il y a là aussi une invitation, pour ses successeurs, à ce qu’ils ne soient pas des disciples, mais des « re-commenceurs ».
Mots-clés
- Ambiguïté
- Cahiers Noirs
- Chaos
- C.G. Jung
- Circumambulation
- Inachevé
- Ligne sinueuse
- Livre Rouge
- Mandala
- Processus